Le plafonnement des indemnités prud’homales est-il conforme
à la constitution ?
Tarek EZZAT
Il est question, à propos de la nouvelle «’loi travail »
de plafonner l’indemnité que le conseil des prudhommes pourra accorder à un
salarié qui aurait subi un préjudice, notamment en cas de licenciement sans
cause réelle ni sérieuse.
Un tel plafonnement s’oppose au principe de droit naturel,
inscrit à l’article 1382 du Code civil aux termes duquel « Tout fait quelconque
de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il
est arrivé à le réparer. »
Ce principe n’est pas seulement traduit par un texte de loi,
il est énoncé, tel quel, à l’article 4 de la Déclaration de 1789. Ce principe
est donc un des fondements du droit établis par la Révolution Française.
La Cour de cassation a déjà statué que; «le propre de la
responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre
détruit par le dommage, et de replacer la victime dans la situation où elle se
serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit ». (Cass. civ. 2e,
28 octobre 1954)
Selon un autre arrêt (Cass. civ 2e, 26 mars 2015, pourvoi n°
14-16011), l'indemnisation doit réparer tout le dommage, mais rien que le
dommage.
Par ailleurs, le Conseil Constitutionnel a déjà confirmé ce
principe (Décision n° 2016-582 QPC du 13 octobre 2016) en statuant qu’ « en
permettant au juge d’accorder une indemnité d’un montant supérieur aux salaires
des six derniers mois en fonction du préjudice subi, le législateur a mis en
œuvre le principe de responsabilité, qui découle de l’article 4 de la
Déclaration de 1789 »
On notera que le Conseil approuve un juge qui a accordé une indemnité
d’un montant supérieur aux salaires des six derniers mois en fonction du
préjudice subi
Dans la même décision, le Conseil précise que ce principe de
responsabilité « découle – comme la liberté d’entreprendre – de l’article
4 de la Déclaration de 1789 … La faculté d’agir en responsabilité met en
œuvre cette exigence constitutionnelle ».
De plus, le Conseil Constitutionnel rappelle que « l’indemnité
prévue à l’article L. 1235-3 vise à réparer le préjudice subi par le salarié en
raison d’une faute de l’employeur, qui l’aurait licencié sans cause réelle et
sérieuse. C’est au juge qu’il revient d’apprécier l’étendue du préjudice en
question ».
Ainsi, on peut conclure ce qui suit ;
1/ La constitution garantit à la victime la réparation de son
préjudice ; tout son préjudice, mais rien que son préjudice.
2/ Seul le juge (et non un barème) est habilité à apprécier l’étendue
de ce préjudice.
J’en déduis qu’une loi qui imposerait au juge un plafond du
montant de l’indemnisation serait contraire à la constitution
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